Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : Di Renjie : Shen du long wang
Père : Tsui Hark
Livret de famille : Mark Chao (Detective Dee), William Feng (Yuchi Zhenjin), Carina Lau (L’Impératrice), Angelababy (Yin Ruiji), Lin Gengxin (Shatuo), Ian Kim (Yuan Zhen), Dong Hu (Prince Huo Yi)…
Date de naissance : 2013
Majorité : 06 août 2014 (en salles)
Nationalité : Chine
Taille : 2h14
Poids : Budget NC
Signes particuliers : Un prequel inférieur à son prédécesseur. Mais parce que c’est Tsui Hark, reste des fulgurances, des grands moments disséminés tout au long d’une oeuvre ambitieuse mais fébrile.
DE RETOUR AU SHERLOCK HOLMES CHINOIS
LA CRITIQUE
Résumé : L’impératrice Wu règne sur la dynastie Tang aux côtés de l’empereur Gaozong. Elle envoie sa flotte vers l’empire Baekje afin de soutenir cet allié de longue date, envahi par le belliqueux empire Buyeo. Mais, juste après leur départ, les navires sont attaqués par une mystérieuse et gigantesque créature surgie du fond des mers. Les habitants de Luoyang, la capitale orientale, pensent qu’il s’agit d’un dragon des mers. Afin d’apaiser ce dernier, la courtisane Yin, « la plus belle fleur de Luoyang », est choisie pour être enfermée dans le Temple du Dragon des Mers ; en fait une punition qui lui est infligée pour avoir refusé les avances de riches notables. L’impératrice Wu, qui n’a guère de temps à accorder à ces superstitions, ordonne à Yuchi Zhenjin, le Commissaire en chef du Temple Suprême, d’enquêter sur l’acte de sabotage dont la flotte a été victime. Elle suspecte les sympathisants de l’empire Buyeo d’être à l’origine du complot. Par chance, Dee Renjie arrive à Luoyang le même jour pour prendre ses fonctions de magistrat au Temple suprême. Il va commencer à enquêter pour résoudre l’énigme de la Légende du Dragon des Mers… L’INTRO :
Génie hongkongais en perte de vitesse depuis pas mal d’années, Tsui Hark s’efforce pourtant (à l’inverse de pas mal d’anciennes gloires du cinéma engluées dans leur propre déclin) de faire ce qu’il faut pour se sortir de sa mauvaise passe et retrouver son lustre d’antan en continuant d’œuvrer avec ambition pour le cinéma made in HK. En résulte une carrière actuellement en dents de scie qui, sur les dix dernières années, apparaît comme sans cesse partagée entre efforts porteurs d’espoir de brillante renaissance et ratés pointant du doigt le fait que « ce n’est plus ça ». Pour un Time and Tide fabuleux et audacieux, un La Légende de Zu complètement manqué, pour de piètres Black Mask 2, Missing ou All About Woman, des sursauts virtuoses tels que Seven Swords ou Détective Dee… Et alors que le cinéaste reste sur un bien mauvais Dragon Gate, la Légende des Sabres Volants en 2011, le voilà qui revient à son dernier hit en date, Détective Dee, héros à partir duquel il semble parti pour développer une franchise. Le fantasme de voir le metteur en scène recréer un nouvelle saga forte à la Il était une fois en Chine ?
L’AVIS :
Avec Détective Dee : La Légende du Dragon des Mers, Tsui Hark renoue avec les aventures de son Sherlock Holmes chinois aux temps de la Chine ancienne. Le principe du film reste le même, avec une enquête mêlée à des éléments fantastiques sur fond d’intrigues de couloirs et de mystères à la Cour Impériale, mais ce nouveau volet n’est en revanche pas une suite directe mais un prequel, allant chercher un Détective Dee plus jeune, à ses débuts de fin limier au sein de la capitale où il doit faire ses preuves, aidé par son intelligence hors norme, son sens aiguisé de l’observation et de la déduction et sa maîtrise des arts martiaux. Pour le premier volet, on avait affaire à une étrange affaire de combustions spontanées qui inquiétait la Cour. Cette fois-ci, c’est un terrible Dragon des Mers qui est à l’honneur, créature gigantesque masquant une fois de plus des complots orchestrés pour déstabiliser le Royaumevet la dynastie en place.
Si le premier Détective Dee marquait un retour en forme de Tsui Hark malgré pas mal de défauts notables, cette « suite » ne confirme pas et déçoit un peu. Une fois de plus, le metteur en scène hongkongais témoigne de sa faculté à alterner le bon et le moins bon dans une carrière devenue un symbole du « pile ou face ». Intrigue moins passionnante et plus laborieuse, à-coups de fainéantise notamment au détour d’une écriture plus brouillonne, manque de fluidité, manque d’homogénéité dans l’équilibre des registres entremêlés, comédiens au charisme fade (le timide Mark Chao peine à faire oublier Andy Lau), lyrisme visuel pas toujours séduisant, créativité forcée… Détective Dee 2 a bien du mal à capitaliser sur les points forts de son prédécesseur malgré une volonté à peine déguisée de recréer la même chose en plus spectaculaire. On ne pourra d’ailleurs pas faire un procès de manque d’ambitions à Tsui Hark car cette suite en a. Beaucoup même. Mais le cinéaste se prend un pied dans le tapis et si visuellement, la dernière demi-heure relève le niveau, notamment autour d’un affrontement en mer avec son monstre attendu au travers de laquelle sa maestria nous réserve un sacré moment d’épique spectaculaire, reste que l’ensemble paraît trop paresseux et bordélique dans le mauvais sens du terme. Du moins au regard de ce que l’on sait le metteur en scène capable…
Détective Dee 2 affiche son manque d’inspiration ou plutôt son incapacité à la canaliser dans un tout cohérent et gracieux. Les efforts de Tsui Hark s’en trouvent plombés alors que le film devient un pot pourri d’idées maladroitement assemblées où sa folie notoire jadis emballante, devient davantage une source de ridicule parfois risible. Le premier degré et la fantaisie s’y combinent mal, la facture policière, fade et nonchalante, ne parvient pas à s’imbriquer aux scènes fantastiques, les envolées martiales aux figures digne de combos de jeux vidéos convoquent le pire du cinéma HK quand il se met à flirter avec le grotesque… Trop versatile à tirer dans tous les sens avec un liant produisant des grumeaux, Détective Dee 2 se retrouve quelque part au carrefour entre l’œuvre foisonnante mais branlante et le raté (les chevaux qui galopent sous l’eau nous ont achevé) seulement sauvé par les éclairs de génie de son auteur.
Moins tourné vers l’enquête policière qui apparaît davantage comme un prétexte à un gros film fantastique à action et arts martiaux un brin ennuyeux et partant dans toutes les directions sans trop savoir quoi faire alors que le cinéaste recycle tout un tas de choses déjà vues dans son cinéma et ceux de ses voisins, Détective Dee 2 n’est pas pensé comme son prédécesseur où les éléments fantastiques étaient un vecteur pour l’enquête, effet plutôt inversé ici. Dommage. D’autant plus dommage que comme d’habitude avec Tsui Hark, on se prend à s’extasier quand il décide de laisser parler sa folie créative au détour de moments foutrement réussis. Au final, Detective Dee 2 n’est pas mauvais, il est juste un cran en-dessous du premier, là où l’on espérait voir le cinéaste faire mieux. Dans tous les cas, il témoigne une fois de plus, même s’il ne le fait pas toujours très bien, que Hark est un grand.
Bande-annonce :
Par Nicolas Rieux