Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : Sous la peau
Mères : Nadia Jandeau & Katia Scarton-Kim
Date de naissance : 2015
Majorité : 06 janvier 2016
Type : Sortie cinéma
Nationalité : France
Taille : 1h05 / Poids : NC
Genre : Drame
Livret de famille : Valérie Chatain, Marie Favasuli, Nadia Jandeau, Katia Scarton-Kim, Sabrina Seyvecou
Signes particuliers : Un premier film maladroit mais pas inintéressant. A découvrir au cinéma Le Saint-André des Arts.
DRAME FAMILIAL ET SECRETS ENFOUIS
LA CRITIQUE
Résumé : Dans la maison de famille, cinq sœurs s’apprêtent à fêter l’anniversaire de leur mère lorsqu’elles découvrent que l’aînée vient de l’assassiner. Leur enfance, marquée par le désamour, la culpabilité et les non-dits va leur revenir tel un boomerang, balayant toute tentative d’oubli. Véra, Dana, Irène, Ophélia et Eve, si différentes dans leurs personnalités, vont alors se confronter les unes et prendre une décision radicale qui scellera à jamais leurs liens. ,Une apnée au cœur d’une famille dévorée par un terrible secret.L’INTRO :
En 2014, on recensait 258 films produits en France. Pourtant, en écumant les semaines qui passent les unes à la suite des autres, le spectateur verra les grosses comédies rutilantes et surexposées, les polars dont on semble raffoler dans l’hexagone, tout un tas de films d’auteur avec ou sans vedettes, quelques « superproductions » phares… Le compte y est ? Pas totalement. Car derrière ces œuvres plus ou moins médiatisées, il y a aussi ce vivier rassemblant les plus modestes efforts, ces films à l’équilibre si fragile, souvent l’accouchement d’un long processus à la gestation discrète mais passionnée, et qui peinent à exister dans une industrie délivrant peut-être trop de sorties hebdomadaires pour leur permettre de se faire une place « au soleil ». Ces films sortent parfois dans une ou deux salles, tentent de faire parler d’eux comme ils le peuvent, souffrant d’un cruel absence d’éclairage. Mais ils ont un mérite, celui d’exister et d’animer la diversité de notre riche cinématographie. C’est le cas par exemple de Sous la Peau, comme avant lui des Etre de Fara Sene ou Le Grand Tout de Nicolas Bazz, pour ne citer qu’eux. Et rien que parce qu’ils sont le fruit d’un travail avec un grand « T », ces entreprises faites dans la sueur et le sang méritent qu’on en parle. Sous la Peau est le premier effort de long-métrage d’un duo de cinéastes, Nadia Jandeau et Katia Scarton-Kim, toutes deux précédemment auteures de plusieurs courts remarqués. Un premier film pas loin du moyen-métrage (1h05), tourné en noir et blanc, dans un lieu unique avec seulement cinq personnages visibles animant une situation traité sur un laps de temps très resserré.L’AVIS :
C’est à partir d’un tragique fait divers que les deux réalisatrices ont élaboré le scénario de ce drame intimiste teinté d’un soupçon de thriller. En 2009, une petite fille succombait aux maltraitances infligées par ses parents. Lors de l’enquête, les entretiens avec ses jeunes frères et sœurs lèveront le voile sur l’horreur du vécu familial. L’un était content de ne pas être à la place de la malheureuse victime, l’autre était terrorisée, une autre encore pensait que c’était « normal »… Parti de cette tragique affaire, le duo s’est alors interrogé sur la façon dont on grandit avec un tel poids, avec ce genre de traumatisme d’avoir traversé l’enfer sans avoir pu agir ou réagir car désemparé ou impuissant. Sous la Peau s’immisce dans une réunion de famille qui vire au drame. Cinq sœurs, une mère qui vient d’être assassinée par l’une d’entre elles, et une situation qui va faire naître des affrontements sur fond d’un lourd secret enfoui depuis bien trop longtemps, tout en analysant à rebours, l’évolution psychologique de chacune de ses protagonistes.Plus tourné vers l’étude psychologique que vers le palpitant sensationnaliste, Sous la Peau prend vite des allures de sorte de pièce de théâtre étouffante filmée au plus près des visages rongés par les secrets et le conflit qui va jaillir de cette situation horrifiante. Les bases du film étaient très intéressantes et le résultat ne manque pas d’idées, qu’il serait coupable de balayer pour ne laisser place qu’aux nombreuses maladresses afférentes. Cinq sœurs liées, toutes très différentes les unes des autres, offrant ainsi de la diversité dans les personnages en présence au centre de ce huis clos électrique. Des personnalités opposées permettant de mieux soutenir les rapports de force qui vont se nouer autour de l’action mais surtout, des personnalités qui vont être un moyen pour Nadia Jandeau et Katia Scarton-Kim d’étudier la construction de ces victimes à travers le temps, avec comme point de départ, une tragédie volontairement oubliée à laquelle tout ramène. Au fur et à mesure que les évènements enfouis se révèlent, au fur et à mesure que le duel psychologique s’étale aux quatre coins de la pièce, ces personnalités et caractères radicalement divergents s’expliquent par leur rapport et leur appréhension du drame passé.Parce qu’il est fortement resserré dans sa temporalité et parce que l’on sent un réel travail d’écriture dominant, pensé et soigné, Sous la Peau tient en haleine autour de la démonstration de ses intentions. Malheureusement, on reprochera beaucoup de choses regrettables au travail des deux metteurs en scène, peut-être par manque d’expérience, de maîtrise et/ou de moyens. A commencer par des carences dans l’intensité et la tension apportées pour saisir à vif ce huis-clos censé être vissé à une atmosphère asphyxiante mais déstabilisée par ses petites teintes d’amateurisme (cela dit pardonnables). Aussi, une attitude parfois un brin poseuse, multipliant les effets de mises en scène superflus en désaccord avec la pureté sibylline tenant les bases de la conception du projet. Enfin, une direction d’acteur en délicatesse, comme si les intentions prédominaient sur tout le reste, laissant au final place à des interprétations inégales par manque d’exigence. Mais malgré ses défauts évidents plombant un peu l’entreprise néanmoins louable, Sous la Peau ne démérite pas entièrement, et demeure un geste cinématographique intéressant, notamment pour l’observation aiguisée de son portrait psychologique, intelligent dans le fond même s’il n’est pas toujours bien illustré dans la forme. Condamner le film pour ses manquements serait facile, mettre en évidence ses qualités l’est un peu moins. Et pourtant, c’est ce que l’on a souhaité en retenir.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux