Nom : Spencer
Père : Pablo Larrain
Date de naissance : 2021
Majorité : 17 janvier 2022
Type : Disponible sur Prime Video
Nationalité : USA, Angleterre
Taille : 1h57 / Poids : NC
Genre : Drame, Biopic fictif
Livret de Famille : Kristen Stewart, Timothy Spall, Jack Nielen…
Signes particuliers : Un portrait psychologique entre fiction et réalité.
DANS LA TETE TOURMENTEE DE LADY DIANA
NOTRE AVIS SUR SPENCER
Synopsis : Le mariage de la princesse Diana et du prince Charles s’est terni depuis longtemps. Bien que les rumeurs de liaisons et de divorce abondent, la paix est ordonnée pour les festivités de Noël au domaine de la reine à Sandringham. Il y a à manger et à boire, à tirer et à chasser. Diana connaît le jeu. Mais cette année, les choses seront bien différentes. Spencer est une illustration de ce qu’il aurait pu se passer pendant ces quelques jours fatidiques.
Ceux qui connaissent le cinéma de Pablo Larrain s’y attendront, les autres sont à prévenir. L’argentin n’a pas pour habitude de faire des films « classiques ». Son univers est très personnel, très singulier aussi. Avec Spencer, Larrain ne déroule pas un biopic traditionnel sur Lady Diana mais une étude psychologique basée sur un récit imaginaire et fantasmé. Qu’on se le dise, rien n’est vrai dans l’histoire que le cinéaste nous conte si ce n’est le plus important, la situation émotionnelle. « Mmmmh, c’est à dire… ? » doivent déjà penser certains ? Pour la faire courte, Larrain imagine trois jours de la vie de la Princesse à l’hiver 1991 lorsque la famille royale se réunit pour les fêtes de Noël. Tout ce que le film va raconter en termes de faits est inventé. Ce qui est authentique (et ce que Larrain souhaitait travailler), c’est l’état psychologique d’une femme à bout de nerfs, pressée de toute part, broyée par la machinerie royale, proche du précipice mental et émotionnel. Pour mettre cet état en exergue et creuser ce regard sur l’instabilité et l’effondrement d’une femme, le réalisateur chilien va puiser dans son vécu, dans certaines vérités, qu’il va exploiter, condenser, ré-agencer. Comme son état dépressif, sa folie latente, ses penchants suicidaires ou sa boulimie. Spencer n’est pas un film d’événements et de péripéties, c’est un pur film d’émotions. Et pour cela, il fallait une grande comédienne capable d’être une éponge et d’absorber ce dangereux état de fragilité. Larrain l’a trouvée en la personne de Kristen Stewart.
Après Jackie où il se penchait déjà sur une figure féminine mise à mal par l’histoire (Jackie Kennedy – formidable Nathalie Portman), Pablo Larrain s’intéresse donc à une Lady Diana à bout de souffle, torturée par les codes extrêmes d’une vie dont elle ne voulait pas. Son erreur aura été d’y croire, son chemin de croix aura été de devoir porter toute sa vie des poids trop lourds pour elle. Et le résultat est étourdissant. La caméra de Larrain scrute de manière viscérale et épidermique un étouffement, celui d’une femme qui perd pied, qui s’enfonce à chaque minute un peu plus dans un océan au milieu duquel elle semble à la dérive, seule et sans bouée à l’horizon. Plus que l’histoire de Lady Diana en elle-même, ce qui intéresse Pablo Larrain tant dans sa narration que dans sa manière de filmer son personnage, c’est de traduire un sentiment d’asphyxie. Spencer se vit comme on porterait un corset trop serré. Le souffle est court, on manque d’air, comme cette Diana en mal d’oxygène. Une Diana qui est tout, qui est le film. Autour d’elle, du Prince Charles à la Reine Elizabeth, tous sont relégués dans un décor flou. L’image ne lâche jamais son sujet, une femme écrasée par l’histoire dans le récit, écrasée par le cadre dans une mise en scène au style aussi symbolique que métaphorique.
Pablo Larrain n’a de cesse de la première à la dernière minute, de sonder les traumas intérieurs d’une âme torturée qui se débat pour éviter la noyade. A l’écran, Kristen Stewart se fond totalement dans la figure qu’elle incarne. Ou plutôt dont elle incarne les démons. Énième preuve de son talent, la comédienne avait la lourde tâche de porter littéralement l’œuvre sur ses épaules et d’épouser les intentions de Larrain. Elle avait surtout la difficulté de devoir incarner non pas Lady Diana mais ses démons. Amatrice de challenges, elle y parvient au-delà de ce qu’il était possible de concevoir, livrant une performance habitée, totale, déchirante.
Par Nicolas Rieux