La Mondo-Note :
Carte d’identité :
Nom : Diego Maradona
Père : Asif Kapadia
Date de naissance : 2019
Majorité : 31 juillet 2019
Type : Sortie en salles
Nationalité : Angleterre
Taille : 2h10 / Poids : NC
Genre : Documentaire
Livret de famille : Diego Maradona…
Signes particuliers : Un documentaire passionnant qui scrute la construction d’un mythe.
IL ÉTAIT UNE FOIS UN MYTHE…
LA CRITIQUE DE DIEGO MARADONA
Synopsis : Le 5 juillet 1984, Diego Maradona débarque à Naples pour un montant qui établit un nouveau record du monde. Pendant sept ans, il enflamme les stades. Le footballeur le plus mythique de la planète a parfaitement trouvé ses marques dans la ville la plus passionnante – mais aussi la plus dangereuse – d’Europe. Sur le terrain, Diego Maradona était un génie. En dehors du terrain, il était considéré comme un dieu. Cet Argentin charismatique aimait se battre contre l’adversité et il a mené le SCC Napoli en tête du tableau pour la première fois de son histoire. C’était un rêve éveillé ! Mais le prix à payer était élevé. Diego pouvait faire tout ce qu’il voulait tant qu’il accomplissait des miracles sur le terrain. Pourtant, des heures plus sombres ont fini par succéder à ces années fastes… Diego Maradona a été réalisé à partir de plus de 500 heures d’images inédites issues des archives personnelles du footballeur.
Après s’être intéressé aux mythes Ayrton Senna puis Amy Winehouse, Asif Kapadia est de retour avec un nouvel exercice au travers duquel il approche une autre légende, du football cette fois-ci. Diego Maradona, probablement l’un des sportifs les plus célèbres du XXème siècle, est le sujet du nouveau film du talentueux et respecté documentariste britannique. Présenté au dernier festival de Cannes, Diego Maradona a été couronné d’éloges dithyrambiques fort méritées. Car encore une fois, Asif Kapadia passionne avec ce qu’il sait faire le mieux, approcher au plus près une légende pour comprendre son génie et les raisons qui en ont fait une icone.
Avec Diego Maradona, Kapadia reprend tous les motifs de son habituel langage documentariste si singulier. Uniquement des images d’archives, des interviews toujours en voix off et l’impression de livrer un film immersif plus qu’un portrait documentaire classique. Déjà avec Senna, le réalisateur avait impressionné par sa capacité à transformer un simple portrait de sportif en un véritable thriller dont le suspens prenait aux tripes. Avec Amy, il avait su élever son regard biographique au rang de tragédie surpuissante. Avec Diego Maradona, il signe un drame émouvant entre gloire et déchéance. Ou comment un homme simple venu des favelas argentines a pu devenir le demi-dieu d’une ville avant d’en être l’homme le plus détesté, devançant même Mussolini dans les sondages. Et à chaque angle de ce portrait captivant, l’envie de dépasser la simple lecture wikipédiesque. C’est toute la force des travaux de Kapadia, cette formidable faculté d’aller chercher plus loin, plus profond, pour extirper le minéral derrière la roche de façade, pour illustrer des idées et thématiques qui dépassent la seule icône qu’il croque.
Soyons clair, que l’on aime le foot ou que l’on s’en contrefoute comme de son dernier caleçon troué, que l’on s’intéresse à Maradona ou que l’on aucune foutue accroche pour l’artiste footballeur qu’il a été, Diego Maradona est un documentaire à voir impérativement. Car encore une fois, Kapadia réussit à passionner pour ce qui, de prime abord, pourrait nous en toucher une sans faire bouger l’autre. Au fond, il n’est pas vraiment question de football dans Diego Maradona, il est question de comment se fabrique les mythes et de comment ils peuvent vaciller dans un contexte défavorable. Ici, il est question d’un jeune homme qui avait un talent, qui a voulu l’utiliser pour sortir sa famille de la misère dans laquelle elle végétait. Cet homme s’est retrouvé dans le sud de l’Italie, à Naples, dans un club sans réelle dimension. Jusqu’à l’arrivée du prodige. Avec Maradona, le « Napoli » s’est mis à tout gagner et tout un peuple jusqu’ici vilipendé s’est mis à bomber le torse avec fierté. Car outre le regard sur l’homme, Diego Maradona se charge d’une dimension sociale et historique passionnante, montrant comment Naples est une cité à part en Italie, une ville détestée de tout un pays et considérée comme le caniveau du pays peuplé d’une populace vue comme des bouseux aux culs crasseux. Avec Maradona dans ses rangs, Naples s’est trouvée une fierté, l’occasion de répondre aux attaques violentes du reste du pays en brillant sur le paysage sportif. Mais cette résurrection a eu un coût qu’un seul homme a payé très cher. Oui, Maradona a payé cher sa starification, son statut de divinité protégée. C’est tout le cœur du film, montrer un colosse aux pieds fragiles, un gamin qui a endossé des responsabilités trop lourdes, une superstar étouffée par son statut.
Les amateurs de ballon rond tiendront là un documentaire incroyable sur l’un des plus grands joyaux de l’histoire du sport, entièrement bâti sur des archives formidables et précieuses. Les désintéressés du foot auront entre les yeux, un portrait bouleversant, tragique, édifiant sur les mécanismes du star-system broyeur (car les années 80 de Diego Maradona sont transposables aussi bien aux années 90 que 2000 ou aujourd’hui). L’histoire du petit Diego, aucune scénariste torturé ne pourrait l’inventer tellement elle est dingue. Son ascension hallucinante, son talent indescriptible, son visage encadré dans toutes les maisons napolitaines aux coté de Jésus ou la Vierge, la mafia qui l’a approché, sa chute lors d’une Coupe du Monde 90 en Italie au scénario tellement ahurissant et injuste. Sans jamais se faire juge ou avocat, Kapadia raconte le mythe Maradona avec une justesse sidérante grâce à des images uniques et livre un documentaire monument.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux