Nom : El Ardor
Père : Pablo Fendrick
Date de naissance : 2014
Majorité : 16 juin 2015
Type : Sortie DVD/Blu-ray
Nationalité : Sud-américain
Taille : 1h41 / Poids : NC
Genre : Western, Thriller
Livret de famille : Gael Garcia Bernal (Kai), Alice Braga (Vania), Claudio Tolcachir (Tarquinho), Jorge Sesan (Tulio), Chico Diaz (João), Lautaro Vilo (Jara), Ivan Steinhardt (l’homme sans revolver)…
Signes particuliers : Un western forestier sud-américain produit et interprété par Gael Garcia Bernal. El Ardor a été présenté hors compétition à Cannes.
LES ARDEURS D’EL ARDOR
LA CRITIQUE
Résumé : Forêt tropicale de Misiones en Argentine. Kaï, un jeune homme solitaire, assiste à l’attaque sauvage d’une ferme de tabac par des mercenaires qui kidnappent la belle Vania dont le père est assassiné sous ses yeux. KaÏ se transforme alors en justicier et les traque un par un dans la jungle.L’INTRO :
Quand on parle « western », on a immédiatement en tête ces éternelles et emblématiques images préfabriquées par les classiques du genre à la John Ford ou Sergio Leone, ces grands décors arides, ces cowboys et ces shérifs, ces chevauchées fantastiques ou ces histoires de règlements de compte à la carabine, ces saloons miteux et ces villages poussiéreux… Mais le western a évolué depuis les années 60 et les codes du genre s’adaptent désormais à tout un tas d’histoires, de registres, de lieux ou de types de personnages. Pour preuve, El Ardor, pseudo-western sud-américain investissant les hautes montagnes argentines, direction la jungle touffue où s’écharpent fermiers locaux et mercenaires à la solde de grands propriétaires cherchant à mettre la main sur leurs terres fertiles par tous les moyens en délogeant de force ces pauvres familles autochtones martyrisées voire assassinées manu militari. Coproduit par Gael Garcia Bernal (qui y tient au passage le premier rôle aux côtés d’Alice Braga) et présenté en séance spéciale à Cannes, El Ardor est le troisième long-métrage du réalisateur Pablo Fendrick. Un film à mi-chemin entre le western forestier et le revenge movie sur fond de discours sur la délocalisation forcée de ces paysans, avec à droite, une bande de méchants patibulaires terrorisant ces contrées reculées, à gauche, une brave famille décimée pour ne pas avoir obtempérer, et au centre, un mystérieux héros-justicier venu de la jungle…L’AVIS :
El Ardor est la curiosité DTV du mois. Un film séduisant sur le papier, agréable à regarder sur sa télé, mais étrangement pas bon malgré un servicing correct, question divertissement. Plus précisément, on ne s’ennuie pas devant l’effort de Pablo Fendrick. Le cinéaste s’appuie sur un script expéditif qui ne laisse pas trop le temps de penser et qui s’efforce de nous empêcher de nous attarder sur les tares qui bordent le parcours de cette série B appliquée à essayer de ne pas en avoir l’air. Malheureusement, c’est raté. Si visuellement le film aurait pu prétendre à un statut plus glorieux avec son atmosphère tour à tour contemplative ou rugueuse, à mi-chemin entre Terrence Malick, Sergio Leone et le Delivrance de John Boorman, c’est son script qui a vite fait de le faire redescendre de son piédestal. Car El Ardor est jalonné de scènes bisseuses qui le tirent fréquemment par le bras pour essayer de l’entraîner dans l’arène aux nanars. Schizophrène, Fendrick s’efforce de résister et El Ardor de se retrouver le cul entre deux chaises, à la fois western pseudo-métaphysique et pur produit du bis déversant massivement des moments de franche rigolade, à ses dépends.
Dans l’ordre, on commencera par la problématique du personnage principal, justicier sorti du bois comme par enchantement alors que tout va mal pour une famille de cultivateurs de tabac où forcément, le père est un ancien au visage buriné et la fille, une mini-bombasse sexy qui a encore toutes ses dents. Cultiver le mystère est appréciable au cinéma, il stimule l’imagination. Sergio Leone était impérial pour cela dans ses classiques avec Eastwood. Mais cultiver le mystère juste pour gagner du temps et ne pas s’emmerder à écrire dans le détail son script, voilà qui est plus fâcheux. Nous voilà donc avec un espèce de croisement entre Rambo, Mimisuku l’indien dans la ville et Gégé de Koh Lanta, du genre à vous retaper un homme avec deux bouts de racines, une fougère et de l’eau chaude. Dans El Ardor, il n’est pas tant un redresseur de tort descendu des plaines mais plutôt un cheveu tombé dans votre soupe fumante à souhait. Aucun aura, aucun parfum intriguant, juste l’impression d’une exposition expédiée à la va-vite histoire d’entrer dans le vif du sujet le plus vite possible. Le début d’un festival d’aberrations narratives et de partis pris hasardeux, à l’image d’un film qui ne sait jamais trop ce qu’il fait, sans cesse hésitant entre le très démonstratif dans la violence gratuite ou le contemplatif privilégiant le hors-champ faussement pudique, hésitant aussi dans sa cinégénie intermittente, capable d’une élégance séduisante comme d’envolées nanardes ou d’errances vers la série télé bas de gamme, ou tâtonnant entre des fulgurances visuelles ou des envolées de bêtises ahurissantes.
A ce titre, on soulignera une musique aussi fine et discrète qu’un potiron dans un champ de roses ou une pelletée de scènes laissant les bras ballants de dépit. Mention à cette séquence d’amour en forêt sous une pluie tropicale érotisante, sorte de cousine dégénérée de 9 Semaines ½, non seulement terriblement idiote et risible mais de surcroît, qui déboule sans crier gare dans un monument érigé à la gloire de l’incohérence des personnages et de leur évolution. Un must de ridicule qui trouvera son maître dans la scène suivante, quand notre Gael se roulera un bon gros joint improvisé. Pour se détendre le slip post-coït car cette chère Alice Braga lui a trop affolé le pantalon ? Non. Pour entrer en méditation chamanico-bouddhiste afin de quémander de l’aide aux divinités de la forêt afin de remonter tout un fleuve à la nage façon Alain Bernard version aborigène.
Frustrant car on perçoit une évidente matière à faire quelque-chose de pas mal, de l’histoire au casting en passant par les intentions cinématographiques, El Ardor est une œuvre mal branlée, maladroite et ratée. C’est surtout une série B déguisée en film d’auteur de luxe. Sauf que l’imposture est vite démasquée et que le film de Fendrick joue sa partition en passant presque pour prétentieux, ce qu’il n’est pourtant pas.
LA BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux