Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : Rogue One
Père : Gareth Edwards
Date de naissance : 2016
Majorité : 14 décembre 2016
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 2h14 / Poids : NC
Genre : SF
Livret de famille : Felicity Jones, Diego Luna, Ben Mendelsohn, Mads Mikkelsen, Forest Whitaker, Donnie Yen, Jiang Wen, Riz Ahmed, Alan Tudyk…
Signes particuliers : Désolé, mais on a préféré Le Réveil de la Force !
LE SPIN-OFF DE LA FORCE
LA CRITIQUE DE ROGUE ONE
Résumé : Situé entre les épisodes III et IV de la saga Star Wars, le film nous entraîne aux côtés d’individus ordinaires qui, pour rester fidèles à leurs valeurs, vont tenter l’impossible au péril de leur vie. Ils n’avaient pas prévu de devenir des héros, mais dans une époque de plus en plus sombre, ils vont devoir dérober les plans de l’Étoile de la Mort, l’arme de destruction ultime de l’Empire.
Rogue One, ou le film qui annonce des divisions de la taille de l’Everest, lesquelles se régleront probablement sur la toile à grands coups de sabres lasers virtuels. Avec ce premier spin-off tiré de l’univers de la saga culte, LucasFilms amorce une pompe qui a déjà fait couler pas mal d’encre, et qui amènera à n’en pas douter, des avis diamétralement opposés, aussi bien sur le film lui-même que sur la pertinence de la démarche. D’un côté, il y a ceux qui verront d’un bon œil les promesses esquissées par une franchise qui se paye enfin une incartade loin des sentiers balisés jusqu’ici empruntés. De l’autre, il y a ceux qui rechigneront à voir la saga être ainsi sucée jusqu’à la moelle. Car avec ces « hors-séries » qui viendront s’ajouter aux vrais chapitres numérotés, Star Wars risque de perdre son côté événementiel, et la franchise de sombrer dans une surabondance de films potentiellement lassante, façon Marvel. Mais revenons-en à Rogue One, l’instigateur du prochain déchaînement de passions.
On est passé par tous les stades en suivant la conception de ce premier spin-off à risque. La joie, avec quelques beaux noms qui rejoignent la mythologie galactique Galaxie, l’extase avec les premières images à couper le souffle, l’inquiétude ensuite, quand la production a révélé un festival de reshoots et quelques remous en coulisses; puis l’espoir, quand les premiers retours dithyrambiques sont tombés de l’avant-première officielle. Des retours dithyrambiques confirmés par la projection presse française, qui a ravi une immense majorité prête à couvrir de louanges le film de Gareth Edwards, certains allant jusqu’à le ranger parmi les meilleurs opus jamais réalisés.
Visuellement, il faut bien avouer que Rogue One défonce. Gareth Edwards n’est pas un manchot de la caméra, tout le monde le sait, et le cinéaste a su prendre en main l’univers à sa disposition, pour livrer quelque-chose de formellement somptueux, nourri par une quantité astronomique d’idées démentes. Une première bonne nouvelle, suivis de quelques autres, mais lesquelles ne manquent pas d’avoir des allures d’arbres cachant un peu la forêt environnante. Nettement plus sombre voire plus violent, ce spin-off inaugural a le mérite de s’auto-marginaliser et d’affirmer sa différence. Libéré du carcan étriqué de la « vraie saga » soumise à de nombreux codes indéboulonnables, Rogue One apparaît plus libre et se permet plus de choses, justement parce qu’il n’est pas un pur « Star Wars » à proprement parler, mais un « A Star Wars Story« , soit un film gravitant autour de la grande Histoire sans vraiment en faire partie prenante. De fait, beaucoup se régaleront de voir enfin quelque-chose de neuf, passé un épisode VII souvent critiqué pour son côté « remake ». Pour le coup, Rogue One ne souffre pas de problèmes de comparaison et jouit d’une certaine fraîcheur qui devrait satisfaire les déçus du Réveil de la Force, même s’il est hors de question d’en tirer là, une généralité dogmatique.
Une chose est sûre, on ne pourra lui enlever une certaine virtuosité tombant souvent dans la grandeur épique bluffante. Là où Rogue One est le meilleur, c’est quand il glisse de son univers originel, pour se métamorphoser en film de guerre hallucinant, comme si le Spielberg d’Il Faut sauver le Soldat Ryan rencontrait le space opera imaginé par George Lucas. Avec ses scènes d’action sidérantes shootées avec génie, l’effort de Gareth Edwards a de la gueule et du souffle… Mais un souffle qu’il perd dès qu’il sort de ses moments de bravoures pour redescendre vers son récit. Le souci rencontré avec Rogue One, c’est qu’on voudrait l’aimer, on voudrait le défendre, on voudrait s’enflammer devant les nombreuses qualités qui l’habitent. Mais le film de Gareth Edwards ne peut se satisfaire de son apparat de bel objet et de ses bonnes intentions éparses, pour tenir fièrement debout. Derrière, la liste de ses défauts est longue. Très longue. A commencer par des enjeux forcément appauvris par sa nature de spin-off racontant les détails d’une plus grande histoire à venir que l’on connaît déjà. Partant de là, difficile de s’attacher à une histoire inéluctablement sans surprise, et qui brasse beaucoup d’air pour alimenter le vide qui l’anime. Très rapidement, ce premier point creuse le fossé qui séparera la plupart des avis à l’égard du film, entre ceux qui marcheront à fond dans cette histoire « d’à-côté », et ceux qui la traverseront sans jamais s’accrocher à quoi que ce soit. Malgré une efficacité maximale et un sens du spectacle indéniable, Rogue One ennuie justement parce qu’il pâtît de sa formulation « anecdotique ». A cela s’ajoute une bande originale pleine de frustration, reprenant les thèmes connus pour mieux les détourner (drôle d’idée !), ou une direction d’acteurs inexplicablement catastrophique (quand tout le monde joue mal à ce point, généralement, c’est que le problème est de plus haut) n’aidant pas à faire exister des personnages tous plus fades les uns que les autres, auxquels on peine à s’attacher viscéralement. Rogue One, bon film et bon Star Wars, l’un mais pas l’autre ou aucun des deux, chacun se fera sa propre opinion.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux