Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : Blackhat
Père : Michael Mann
Date de naissance : 2014
Majorité : 28 juillet 2015
Type : Sortie vidéo
(Editeur : Universal Pictures)
Nationalité : USA
Taille : 2h13 / Poids : 70 M$
Genre : Thriller
Livret de famille : Chris Hemsworth (Hathaway), Viola Davis (Barrett), Lee-Hom Wang (Dawai), Tang Wei (Lien), William Mapother (Donahue), John Ortiz (Pollack), Holt McCallany (Jessup), Ritchie Coster (Kassar)…
Signes particuliers : Après six ans d’absence, le prodige Michael Mann est enfin de retour au cinéma avec un thriller informatique moderne sur le hacking, porté par la star du marteau, Chris Hemsworth.
MICHAEL MANN L’AVAIT HACKER
LA CRITIQUE
Résumé : Hacker suit un détenu en permission et ses associés américains et chinois dans leurs efforts pour traquer et démanteler un puissant réseau de cybercriminalité internationale, les entraînant de Chicago et Los Angeles à Hong Kong et Jakarta. L’INTRO :
Échec au box office américain, Hacker a subi de plein fouet une conjoncture de programmation malheureuse, adossée aux difficultés marketing d’un film à cheval entre deux publics, tiraillé entre son sujet et son exigence. Le carton surprise du American Sniper de Clint Eastwood, le beau démarrage de Paddington ou le mineur The Wedding Ringer lui ont miné le terrain mais cela n’explique pas tout. Le dernier coup de lame est venu de la presse avec des critiques mitigées que la présence de la superstar Chris Thor Hemsworth n’a pu contrebalancer pour éviter le premier gros crash de l’année 2015. Absent des écrans depuis six ans et Public Enemies, Hacker marquait pourtant le retour du très côté Michael Mann, habitué aux bons papiers et aux louanges dithyrambiques, tant des critiques que du public. Le cinéaste septuagénaire aurait-il perdu la main et se dirigerait-il vers la pente descendante d’une fin de carrière en demi-teinte, comme tant d’autres ?L’AVIS :
L’avantage avec Michael Mann, c’est qu’il est si virtuose en temps normal, que même un film mineur demeure « sacrément pas mal ». Hacker n’est sans doute pas la meilleure réalisateur du père de Heat, Le Sixième Sens ou Collatéral. Loin de là. C’est peut-être même l’une de ses plus « faibles ». Ou plutôt, l’une de ses plus anecdotiques, dira t-on, au vu de son impressionnante filmographie. Pourtant, et malgré ce degré de relativité, Hacker reste une œuvre passionnante et dédaleuse, un thriller informatique déployant un scénario complexe et intelligent, semblable aux toiles d’araignée des grands films d’espionnage, que le cinéaste porte à l’écran avec une certaine maestria traversée de fulgurances artistiques comme seul lui en est capable. L’on s’en rend compte dès l’ouverture, avec la visualisation vertigineuse et presque expérimentale d’un hacking imagé d’un point informatique. Une entame saisissante immergeant tout de suite le spectateur dans l’univers d’un film qui s’annonce hautement soigné et créatif.Les torts de Hacker sont nombreux. Des longueurs ralentissant parfois le rythme, une inspiration formelle aléatoire, une histoire alambiquée cumulant quelques improbabilités ou encore un script débordant d’ambitions. Trop peut-être. Pourtant et malgré cette réunion de facteurs qui auraient condamné habituellement quantité de longs-métrages lambda, Hacker reste un film impressionnant, souvent surprenant, placé sous le ciel protecteur d’une tension permanente, nourrissant un suspens évoluant sur une corde raide et calqué sur des enjeux narratifs maîtrisés, que Michael Mann parvient à régulièrement relancer au détour de séquences fortes et percutantes. Thriller solide traînant de temps en temps la patte mais jamais bien longtemps, avançant quand même avec une précision aussi saisissante que densément riche, Hacker captive, étourdit, et nous embarque sans peine dans son enquête dynamique et cavaleuse, traversant le globe de l’Amérique à l’Asie, au gré de ses à-coups nerveux. Dès que Mann décide de filmer une fusillade ou une montée d’adrénaline, prévoir toujours un soutien-mâchoire tant visuellement, il éblouit de son brio.Alors que Chris Hemsworth confirme une fois de plus tout le bien que l’on pense de lui (malgré quelques roulages de mécanique cabotins mais rendant son personnage presque iconique), Hacker s’appuie sur la science dramaturgique d’un auteur toujours brillant dès qu’il s’agit de s’attacher à des personnages tout en nuances, luttant intérieurement entre leurs multiples facettes et démons rongeurs. Le résultat nous mène, à l’instar de Miami Vice pour ne citer que lui, vers un film sombre, refusant le policé et au contraire, affichant des aspérités qui lui confèrent toute sa personnalité.
Non, Michael Mann n’est pas mort. Tant pis pour le public américain qui aura boudé ce onzième long-métrage d’un artiste peu prolifique mais hautement qualitatif, qui prouve encore une fois son talent. Et si Hacker pourra être perçu comme « un peu moins bien qu’à l’accoutumée », il n’en est pas moins furieusement intéressant pour autant. En espérant maintenant que le film ne soit pas victime du piratage. Ce serait le comble pour un film intitulé Hacker !
LE BLU-RAY
Image parfaitement travaillée et son très bien équilibré, pas grand-chose à redire sur la galette éditée par Universal, qui a su respecter la richesse des ambiances colorimétriques et la profondeur des plans de nuit du film de Michael Mann. A ce propos, c’est justement le travail de l’artiste qui se retrouve ensuite au coeur des suppléments, au nombre de trois. D’abord, un premier sujet plus spécifique au sujet de Hacker, s’intéressant à la cyber-menace, thématique qui a donné naissance au film. Un petit « making-of » d’environ 13 minutes où interviennent autant Michael Mann et Chris Hemsworth, qu’un mathématicien, un ancien hacker ou un agent spécialisé dans le cyberterrorisme. Bien que passionnant dans ce qu’il aborde, ce premier module est cependant un peu confus dans son montage et sa narration, parlant du film et du travail d’authenticité, mais aussi de la menace informatique aujourd’hui, du profil d’un hacker… Bref, d’un peu beaucoup de choses qu’il aurait peut-être été préférable de séparer pour plus de clarté. Des États-Unis à Hong-Kong en passant par la Malaisie ou l’Indonésie, c’est pas moins de 74 décors dans 4 pays différents qui défilent dans Hacker. Une gymnastique géographique qui méritait bien un module à elle, revenant sur la minutie de Michael Mann dans le choix de ses décors et surtout la façon très particulière qu’a le cinéaste, de les approcher et de les filmer pour en tirer toute leur authenticité. Ce souci de véracité quasi-obsessionnelle se retrouve également dans le troisième et dernier supplément, porté pour sa part, sur la volonté permanente de réalisme dans le cinéma du Mann. Loin des standards des bonus traditionnels et plus portés vers l’analyse formelle et la philosophie artistique du cinéma du metteur en scène et sa manière de travailler, ces suppléments s’avèreront fort appréciables pour les cinéphiles.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux