Mondociné

’71 de Yann Demange
Critique – Sortie Ciné

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71Mondo-mètre
note 8 -10
Carte d’identité :
Nom : ’71
Père : Yann Demange
Date de naissance : 2013
Majorité : 05 novembre 2014
Type : Sortie en salles
Nationalité : Angleterre
Taille : 1h39 / Poids : NC
Genre : Guerre

Livret de famille : Jack O’Connell (Gary), Lewis Paul Anderson (Sgt Leslie), Richard Dormer (Eamon), Sean Harris (Browning), Martin McCann (Paul), Sam Reid (Armitage), David Wilmot (Boyle), Killian Scott (Quinn)…

Signes particuliers : Un film de guerre et survival d’action à couper le souffle, véritable uppercut aussi saisissant que tendu et sans concession. Yann Demange accouche d’un très grand « petit film » au triomphe modeste mais à la virtuosité éclatante. Une claque bourdonnante.

UNE NUIT EN ENFER

LA CRITIQUE

Résumé : Belfast, 1971. Tandis que le conflit dégénère en guerre civile, Gary, jeune recrue anglaise, est envoyé sur le front. La ville est dans une situation confuse, divisée entre protestants et catholiques. Lors d’une patrouille dans un quartier en résistance, son unité est prise en embuscade. Gary se retrouve seul, pris au piège en territoire ennemi. Il va devoir se battre jusqu’au bout pour essayer de revenir sain et sauf à sa base.71  L’INTRO :

’71 est de ces films qui viennent un peu de nulle part et dont on n’a pas forcément entendu parler auparavant… à moins d’être attentif aux manifestations cinématographiques européennes. Parce que ’71 aura été très remarqué à Berlin cette année où il était nommé dans la plupart des catégories. S’il n’aura rien remporté en Allemagne, il se sera en revanche payé le Prix du Jury au Festival du Film Policier de Beaune. Et c’était la moindre des choses pour mettre en lumière ce premier long-métrage du cinéaste français expatrié en Angleterre, Yann Demange (réal sur l’excellente série Dead Set), porté par la jeune étoile Jack O’Connell, révélé par son rôle de prisonnier turbulent dans le film carcéral Des Poings contre les Murs.

71-6
L’AVIS :

Survival, thriller, film de guerre, drame historique, film d’espionnage, film d’action… Difficile de situer ’71 tant il est un peu tout cela à la fois. La seule classification claire et nette que l’on pourra lui attribuer, c’est celle de baffe cinglante. Pour un premier film, Yann Demange assène un uppercut monumental, claque violente sur l’oreille qui laisse un bourdonnement sourd, bien longtemps encore après la fin de la séance alors qu’hébété, on reste sous le coup de l’onde de choc de cette expérience immersive et déstabilisante. Il est des films comme ça, dévastateurs et dont on a bien du mal à se remettre. ’71 en fait partie et sa puissance brute de décoffrage en serait presque traumatisante.71_2 Le titre ’71 renvoie à l’époque la plus trouble de Belfast et par extension de l’Irlande, alors que les tensions entre Catholiques et Protestants, irlandais et anglais, IRA et armée britannique étaient à leur paroxysme. Yann Demange nous plonge dans une virée sans concession le temps d’une nuit cauchemardesque pour un jeune soldat anglais abandonné par sa division au-delà des lignes ennemies après un violent affrontement dans un quartier bouillonnant. Devenu la proie d’une population en guerre dans un milieu qui lui est furieusement hostile, le malheureux se retrouve à être le centre d’une sorte de survival historique de guerre âpre et brutal, où sa survie passera par sa capacité à lutter pour parvenir sain et sauf à rejoindre sa base. Ayant grandi à Londres, le cinéaste a pu observer tout cela étant gamin, grâce aux journaux, aux conversations ou à la télévision. Et aujourd’hui de le resservir dans un récit qu’il voit comme intemporel, la peinture qu’il fait de cette lutte acharnée condensée sur quelques heures en pleine guerre civile, pouvant se lire comme le reflet de n’importe quel conflit actuel dans le monde.71_1Yann Demange livre sans se cacher ses références, allant de New York 1997 de Carpenter à L’Armée des Ombre de Melville en passant par Les Guerriers de la Nuit de Walter Hill. C’est avec une virtuosité épatante que le cinéaste brasse cette culture cinéphilique, pour accoucher d’un premier film coup-de-poing, saisissant de bout en bout, haletant au point d’en devenir férocement stressant et d’une intelligence qui n’a d’égale que son lourd suspens suffocant. Car ’71 a le mérite de ne jamais s’enfermer dans une vision unilatérale ou dans un quelconque manichéisme idiot. Le cinéaste essaie au contraire de mettre en exergue les tenants et les aboutissants d’un conflit complexe. Peut-être un peu trop d’ailleurs pour ceux qui n’auraient pas le bagage historique collant au sujet, et qui de fait, pourront parfois ressentir une sensation de décrochage face à la multiplicité des intervenants aux motivations troubles, alors que les ambitions du film ne correspondent pas toujours à un budget que l’on sent assez réduit. ’71 pourra sembler par moments compliqué. Il l’est. Mais cela ne gâchera pas nécessairement l’expérience viscérale qu’il propose.71_4 Sacrément énergique alors que le désespoir de son personnage principal transcende ses mouvements et le récit, subtilement touchant alors que les émotions ne sont jamais affichées avec emphase ou facilité mais plutôt glissées au détour d’une forme de vulnérabilité qui étreint non seulement le héros mais aussi certains personnages secondaires, ’71 est un film qui se vit en apnée, une œuvre choc et hard-boiled qui ne ménage pas le spectateur, pas plus que l’intensité de l’action généreuse ou de la tension épidermique qui régie les plus sensibles guerres civiles au contexte explosif. ’71 est à la fois un film d’auteur brillant et passionnant et dans le même temps, une œuvre cruellement divertissante. Un vrai tour de force et une sacrée surprise !

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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