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THE STRANGERS de Na Hong-jin : la critique du film

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the_strangers_na_hong-JinMondo-mètre
note 3.5 -5
Carte d’identité :
Nom : Goksung
Père : Na Hong-jin
Date de naissance : 2015
Majorité : 06 juillet 2016
Type : Sortie en salles
Nationalité : Corée du Sud
Taille : 2h36 / Poids : NC
Genre : Horreur

Livret de famille : Kwak Do-Won, Hwang Jeong-min, Chun Woo-hee…

Signes particuliers : Le réalisateur des excellents The Chaser et The Murderer s’attaque à l’horreur et signe une grande fresque sur le Mal.

LE MAL EST PARMI NOUS

LA CRITIQUE DE THE STRANGERS

Résumé : La vie d’un village coréen est bouleversée par une série de meurtres, aussi sauvages qu’inexpliqués, qui frappe au hasard la petite communauté rurale. La présence, récente, d’un vieil étranger qui vit en ermite dans les bois attise rumeurs et superstitions. Face à l’incompétence de la police pour trouver l’assassin ou une explication sensée, certains villageois demandent l’aide d’un chaman. Pour Jong-gu aussi , un policier dont la famille est directement menacée, il est de plus en plus évident que ces crimes ont un fondement surnaturel…the_strangers_na_hong-Jin_2L’INTRO :

Comme beaucoup de cinéastes ayant émergé avec des réussites inscrites dans une même veine, Na Hong-jin avait besoin de se réinventer après les deux brillantes claques que furent The Chaser et The Murderer. Le réalisateur coréen délaisse donc le thriller urbain hard boiled et quitte le cadre de la ville pour partir du côté de la campagne profonde, dessinant avec The Strangers, une fresque horrifique sur le Mal convoquant mysticisme, superstitions, paranoïa et meurtres hardcore bousculant la vie tranquille d’un petit village reculé. Présenté à Cannes (hors compétition), The Strangers aura été un choc pour beaucoup, un film dément, qui confirme une fois de plus, toute la vitalité d’un cinéma asiatique aux ressources décidément inépuisables.the_strangers_na_hong-Jin_4L’AVIS :

Œuvre charnelle, physique, mentale, sanglante, psychologique, spirituelle, métaphysique, sinueuse et surtout joueuse, The Strangers est le genre de long-métrage à voir les choses en grand. Très éprouvant, souvent inconfortable et parfois déroutant, le dernier effort de Na Honh-jin n’est pas simplement un film, c’est une expérience viscérale, complètement hallucinée, et qui navigue perpétuellement entre le réalisme tangible et le surnaturel théologique à connotation sociale. Le metteur en scène coréen ne facilite jamais les choses pour son public sérieusement bousculé dans son petit confort de spectateur posé dans son fauteuil de cinéma. Démarrant comme un thriller policier nappé d’une touche horrifique, The Strangers dérive lentement vers le film d’épouvante fantastique (ou pas), laissant toujours planer le doute sur ses intentions et ses directions. On est parfois un peu perdu dans cette toile gigantesque, probablement parce que le film évolue sans cesse entre des lignes troubles, titillant son auditoire en exigeant de lui, une attention permanente pour soutenir l’intensité d’un récit qui interpelle en permanence, par la folie de son histoire, par la manière dont il redistribue les cartes de son intrigue en cours de route, ou encore par la beauté de sa mise en scène relevées de fulgurances virtuoses. Car cinématographiquement, Na Honh-jin a mûri. La première heure et demi de son The Strangers affiche un très haut niveau narratif, esthétique et artistique, qui vient porter un récit particulièrement dense, sombre et angoissant. Avec le risque de voir cette même densité, se retourner un peu contre lui. Car dans sa dernière heure, The Strangers devient plus difficile à appréhender, s’élevant pour les uns vers des sommets de cinéma horrifique, dérapant au contraire vers le grotesque foutraque pour les autres, avec au passage un manque de crédibilité aux entournures de son univers paradoxalement « réaliste et fantastique ».the_strangers_na_hong-Jin_3Baignant dans un nihilisme radical illustrant à sa manière, une société coréenne gangrénée de toute part par un Mal qui peut s’inviter partout et dans tous les foyers, The Strangers ne réussira pas forcément à captiver tout le monde sur l’ensemble de ses larges 2h36, mais il saura procurer une certaine excitation, celle de faire face à un cinéma ambitieux dans le registre du genre, nous mettant aux prises avec une certaine définition du Mal absolu. La lourdeur de son atmosphère inquiétante étouffe, ses images jusqu’au-boutistes terrifient, et les rares éclaircies au milieu d’une inlassable pluie battante qui étreint l’écran, seront à aller chercher du côté des pointes d’humour burlesques quasi salvatrices, qui amènent un peu de respirations dans la noirceur d’un récit poisseux comme on les aime. Car le héros de The Strangers n’a rien d’un héros sans peur et sans reproches. Policier couard et fainéant, il est le lien entre nous et cet univers insaisissable. Il ne sait jamais comment faire face à la folie qui s’empare de son village, il est dépassé, submergé par ce mélange de violence et d’ésotérique qui se rapproche de plus en plus dangereusement de sa petite vie bousculée par une hystérie collective.224566.jpg-r_1920_1080-f_jpg-q_x-xxyxxGlobalement brillant et formidablement élaboré, The Strangers risque d’en laisser plus d’un sur le carreau, notamment au terme de son aventure conclue par un dernier quart d’heure proposant une saillie vers des cimes où il touche à la fois à l’ésotérique déroutant et à l’horreur pure, pétrie dans une noirceur dévastatrice. Un final auquel on pourra reprocher une maîtrise plus relative, loin de la rigueur jusqu’alors entrevue, voyant ainsi le film s’abîmer légèrement dans sa démarche abattant son ultime carte de la confusion des rôles, comme s’il nous perdait un peu à force d’avoir chercher à l’excès, à nous égarer dans sa maestria narrative faite de fausses pistes permanentes. Mais on préfèrera en garder le souvenir d’un choc, comme si I Saw the Devil rencontrait Se7en et L’Exorciste.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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